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- Quelques poèmes d’auteurs francophones d’un autre temps, pour compenser le décalage avec la globalisation de notre chère planète.
© – Ce site a été réalisé par Marc Bolis, webmestre autodidacte et les photos de couverture de la forêt de Compiègne, par Isabelle Guénand-Hercelin.
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Préface de Jean Favier (1932 – 2014) | Membre de l’institut | Président de la Bibliothèque de France
Avant la ville, il y a la forêt, et c’est elle, avec son gibier, qui attirera pendant des siècles des cours royales ou impériales. Mais c’est d’un nœud de communications que Compiègne tire d’abord sa longue histoire, celle d’une position exceptionnellement favorable de franchissement et d’un port au point de rupture et de transbordement entre la navigation fluviale et la route terrestre qui relie la Flandre à Paris, autrement dit par le fleuve à tout le bassin de la Seine et par la route à celui de la Loire.
Aux temps mérovingiens et carolingiens, Compiègne est un domaine royal, et non des moindres, puisque s’y tiennent aux VIIIe et IXe des conciles de l’Église franque, et que le roi Charles le Chauve y édifie une chapelle palatine dont il entend faire l’égale de celle de Aix-la-Chapelle, dévolue à son frère aîné Lothaire. Près de la résidence royale, Charles fonde Saint-Corneille, et c’est autour de l’abbaye que se développe au Xe siècle un bourg où s’établissent les marchands attirés par le passage du trafic commercial qui renaît. Les Normands ravagent Compiègne. Charles le Simple restaure la ville au début du Xe siècle. C’est désormais une forteresse d’importance stratégique, et ce rôle ira grandissant quand Paris deviendra la capitale du royaume, et que Compiègne sera le verrou de l’une des routes de Paris.
Pendant ce même Xe siècle décisif pour Compiègne, naît une foire, à la Mi-Carême. On y voit du blé de Picardie, du vin de Bourgogne, du bétail et de l’outillage, mais surtout ces draps de Flandre et d’Artois qui seront pour longtemps l’objet réputé d’un commerce de luxe à long rayon.
Ne nous étonnons pas si Compiègne est l’un des enjeux des combats de la dernière partie de la guerre de Cent Ans. C’est sans plaisir que Philippe le Bon a vu Charles VII prendre la ville et y tenir sa cour. Désireuse de passer à l’offensive après les déboires de l’hiver 1429 – 1430, de surmonter les réticences des qui commencent de la trouver encombrante et le scepticisme des capitaines, Jeanne d’Arc se propose pour défendre la ville. Les hommes d’armes, qui la suivaient avec enthousiasme au temps des victoires, sont moins heureux de voir une femme se mêler à nouveau du métier des hommes à l’heure où les choses vont mal. L’héroïne d’Orléans n’est guère suivie, encore moins protégée. Une malencontreuse sortie fait d’elle, revenue trop tard vers la ville dont on a déjà fermé les portes pour que les Bourguignons ne s’y engouffrent pas, la prisonnière d’un capitaine bourguignon désargenté, qui se trouve trop fortuné de la vendre à haut prix aux Anglais. On jugera Jeanne. Mais elle a été capturée dans le diocèse de Beauvais. C’est donc l’évêque Cauchon qui présidera le tribunal.
Les rois sont grands chasseurs. Bien sûr, l’aristocratie aime présenter sur ses tables le gibier des forêts. Plus que par ce goût que satisferaient des chasseurs professionnels, l’aristocratie a fait de la chasse une activité essentielle, parce qu’elle est, depuis le haut Moyen Age, un exercice de vaillance, une préparation à la guerre, mais aussi un jeu social. Chasser est une prérogative hautement symbolique. Avec la fête qui l’accompagne, et qui y associe, le soir venu, la société des dames, la chasse est l’une des formes de cohésion du groupe social. C’est aussi un moyen de gouvernement. Être invité à la chasse royale est une faveur, qui rémunère la fidélité. C’est donc pour satisfaire leur passion de la chasse que Louis XIV vient soixante-quinze fois dans le vieux château de Compiègne, et que Louis XV fait construire par Gabriel, à partir de 1740, le nouveau château, à l’ordonnance toute classique soulignée par le jardin, dont Gabriel conçoit lui-même les plans, largement inspirés de Versailles. La galerie des chasses et la série de tapisseries des Gobelins dites « des Chasses de Compiègne » le disent bien : ce qui fait le prix du château, c’est la forêt.
Louis XVI reprend les travaux interrompus par manque d’argent pendant la guerre de Sept Ans. Compiègne est, sur la route qui la conduit à Paris, le lieu de sa rencontre avec cette Marie-Antoinette qu’on lui donne pour épouse dans une recherche d’un nouvel équilibre politique européen. Napoléon, qui renouvelle le décor du château, y accueille à son tour Marie-Louise, dont la venue signifie elle aussi une démarche politique, une tentative de stabilisation de l’Europe autant que de consolidation de son pouvoir dynastique. On voit ensuite à Compiègne Louis XVIII puis Louis-Philippe, qui y fait célébrer le mariage de sa fille Louise avec le premier – et tout nouveau – roi des Belges, Léopold Ier. Compiègne est un lieu d’histoire, mais c’est encore une étape. Les choses changent avec Napoléon III et Eugénie, qui font de Compiègne l’une de leurs résidences préférées. Le château devient la façade de l’Empire, le symbole d’une France où – l’empereur veut que l’Europe le sache ‑règnent l’ordre et la prospérité. Pendant que la France se dote d’un réseau ferroviaire, pendant que l’industrie s’établit définitivement, et que la banque organise le développement économique, pendant que l’on creuse le canal de Suez, Compiègne accueille le faste qui est une manifestation de grandeur autant que le divertissement d’un souverain qui aime la fête. La cour y chasse en forêt. On donne des soupers et des bals dans la grande galerie qu’avait entreprise Napoléon Ier, et qu’achève Napoléon III. On joue à Compiègne la comédie comme l’opéra. On y reçoit les notables de l’Empire aussi bien que les hôtes couronnés.
La chute de l’Empire met fin aux festivités. On danse toujours, mais la Belle Époque se fêtera ailleurs. Comme à Paris ce qui reste des Tuileries, Compiègne évoque de mauvais souvenirs pour la République. Il faut la guerre pour rendre un rôle au château : en 1917, il abrite le Grand Quartier Général français. L’aboutissement en sera, dans la clairière de Rethondes, le rendez-vous du 1 novembre 1918, auquel répondra celui de 1940.
Reste une ville forte de sa position et de son dynamisme, un château qui compte parmi les plus remarquables d’un pays qui en compte tant, et une forêt où se jouera toujours la symphonie des saisons.